Chap02: Le changement

Par une nuit d’encre, inquiétante et malsaine telle toutes les nuits dans les recoins de Gangrebois, une étrange mélopée se faufile dans les airs arrivant à l’oreille des démons ou faune locale en cassant le silence propre à la région.
Non loin de là, à la source de cette complainte entonnée, au fin fond des vestiges d’un passé oublié, une porte dissimulée entre deux arbres morts et du lierre, donnait sur un dédale de couloirs qui abritait le théâtre de ce qui allait changer notre existence toute entière.

A mesure que l’on rentre dans les profondeurs obscures de ce labyrinthe souterrain, l’écho des psaumes morbides se fait plus fort, portant avec elle l’odeur de la mort des nombreux cadavres qui jonchent le sol. Plus loin encore, quelques dizaines de mettre après la dernière dépouille, s’ouvre une gigantesque caverne aux recoins tellement profonds qu’ils semblent rejoindre les entrailles de la terre. Là, tapis dans l’ombre, nous autres derniers gardiens, étions les spectateurs médusés d’un spectacle auquel aucun d’entre nous ne s’attendait.

Au centre de la caverne trônait un gigantesque portail d’où émanait une aura maléfique et puissante ébranlant en même temps la chair et l’esprit des pauvres intrus que nous étions. Autour un cercle formé de démonistes et autres adorateurs psalmodiaient en chœur dans une langue qui m’était inconnue. Nous ne comprenions rien, les connotations nous étaient tellement étrangères que nous étions incapables d’en percevoir les émotions. Quelques mots malgré tout resurgirent, confrérie, mort, cérémonie, Ordre de Titania, ce dernier nous interpella au plus haut point, était-ce le nom de leur ordre ? Nous laissâmes nos suppositions pour plus tard, si un plus tard survenait un jour.
L’odeur du sang et des entrailles qui tapissaient les parois ainsi que les émanations âpres de quelques failles se faisaient intenables et renforçait l’ambiance engendrée par ce cortège macabre, au rythme des danses inlassables des ombres dessinées par des feus que l’on croirait vivants.
Etait-ce un sortilège, une malédiction ? Nul ne le sait mais aucun de nous n’arrivait à se mouvoir, aucun de nous n’arrivait à décoller ses yeux du spectacle tandis que chacun sentait le malaise insoutenable à mesure qu’une présence semblait nous caresser l’échine.
Le souffle haletant, presque imperceptible, le front perlant de sueur, les battements de cœur si puissants qu’ils résonnent dans notre tête allant presque jusqu’à couvrir le bruit de la cérémonie, notre frayeur n’avait d’égal que notre impuissance. Nous étions devenus incapables de raisonner, incapable de réagir, nous étions des pantins figés, spectateur de notre perte, manipulés par une puissance trop grande que pour être exprimée avec des mots.

Les voix rauques se firent plus fortes, les danses plus acharnées, une sorte de transe emportait ces suppôts du malin, un instrument de percussion, probablement un tambour, emportait la cadence du cauchemar, ponctué par des cris bestiaux dont nous ne pouvions voir la provenance. La terre trembla en même temps que notre faible souffle se déroba dans une dernière bouffée d’air, nous pensions être arrivés au terme de l’attente. La pression que nous ressentions jusqu’alors n’était que peu de choses comparés aux quelques secondes qui suivirent, l’ombre d’une entité terrifiante se penchait sur nous sans rien n’apparaissent devant nos yeux, nous ressentions une présence sans que personne ne soit là, nous ressentions un souffle chaud sans qu’il n’y ait une seule brise, nous nous sentions des pions dans la paume d’un géant. Mais plus que ce que nous subissions, c’est l’aboutissement de la cérémonie qui nous surprit. Le portail grondait, luisait et se mouvait, des bruits que l’on pourrait interpréter comme plusieurs voix d’outre tombe qui se chevauchent terrifiait autant nos hôtes que nous même. Le souffle chaud que nous ressentions auparavant se transforma en tornade et seul nous, statiques et lourds comme des statues ne furent pas emportés.

Les disciples tournoyaient happés et broyés par des mains fantomatiques, tel des ectoplasmes, jaillissants du portail, les entraînant avec eux dans un enfer de douleur et de cris. Ce tourbillon de sang et de cris ne nous laissa pas indifférant, terrifiés, mentalement affaiblit, nous ne savions pas à quoi nous attendre ni ce qu’on pouvait espérer. Tandis que le massacre continuait, la lumière se fit plus forte, la lueur en devenait insoutenable. Le choc qui s’en suivit fut terrible, une douleur dévastatrice nous terrassa, nous avions l’impression que notre tête s’ouvrait en deux, écartelée, ou un dément pourrait graver en lettre de flammes ce que bon lui semble. La douleur se répandit à tout le corps, comme transpercé par des milliers d’aiguilles, aucune partie de nous était négligée et nos maux se voyaient arriver à leur apogée. La lueur blanche, seul décor devant nos yeux écarquillés se fit encore plus forte, nous fûmes assaillis par des images entremêlées, des sensations de craintes, de douleur, des sentiments qui n’étaient pas notre, défilaient devant nos yeux ou dans nos cœurs. Passion, cruauté, sang, meurtre, nous avons cru perdre la raison mille fois devant cet étalage atroce accompagné de nos propres souvenirs, orchestré par une voix incompréhensible qui maugréait continuellement et pas saccade.
Notre esprit s’éteignit un instant, faisant place à un désir unique qui mouvait notre corps, la soif inéluctable d’un pouvoir plus grand, l’envie de dominer, l’envie d’être l’égal d’un dieu, d’être un dieu. Telle une destinée qui nous attendait depuis toujours enfuis au fond de nous, tel un besoin qui nous avait accompagné toute notre vie dirigeant toutes nos actions mais qui ne s’éveillait qu’aujourd’hui, battant à l’unissons avec notre cœur.

Oui ! J’ai besoin de ce pouvoir ! Donne le moi ! ! Donne le moi ! ! !

Mais pour toute réponse, les deux grands yeux qui s’étaient ouverts, balayant tout le reste, ne faisaient que nous fixer. Inquiet ? Satisfait ? Je ne saurais le dire, ils n’étaient pas humains, ils ne laissaient pas paraître autre chose que leur propre nature.

Un silence, un moment de répit, la douleur disparut et le calme revint alors que nous nous éveillâmes d’un rêve éveillé. Meurtris de corps et d’esprit, il nous fallut un moment pour que l’on regagne le contrôle de notre corps. Un moment pour que la folie s’amenuise et que nos facultés reviennent. Songeurs, effrayés, nous réagissons différemment à une expérience qui était peut être différente pour chacun d’entre nous, nul n’en dit un mot, nul ne voulait réaliser ce qui était pourtant perceptible, nous avions tous changé, nous n’étions plus maître de nous même, un changement encré profondément en nous comme si notre âme elle même avait été modifiée. Toujours muets, nous décidâmes de partir, traînant nos corps fatigués vers l’air libre.


Par une nuit d’encre, inquiétante et malsaine, telle toutes les nuits dans les recoins de Gangrebois, une étrange mélopée s’est éteinte, tirant le rideau sur le chapitre d’une vie... la notre.

Lorsque nous nous réveillâmes le lendemain, personne n’osa aborder les événements de la veille. Mais personne ne douta un seul instant au fond de lui que ce qui s’était passé pouvait résulter d’un cauchemar, nous ressentions trop notre déchéance dont le compte à rebours avait déjà commencé.
Nous ne savions pas grand chose sur ce que nous avions vu, il fallait donc s’informer. Parmi les maigres informations que nous possédions, il y avait les paroles des démonistes, cet Ordre de Titania que nous pensions à tort être le nom de leur confrérie. Après quelques recherches nous ne pouvions que constater avec tristesse notre erreur. L’ordre ne semblait à première abord n’avoir aucun rapport avec notre mésaventure, peu de choses étaient arrivées à nos oreilles, il semblerait qu’ils travaillent à garder l’équilibre fragile du monde.

L’espoir vint d’un ancien somptueux, ce dernier en son temps était un expert en informations et en possédait quelques unes sur l’ordre. Il disait n’en avoir jamais vérifié lé véracité mais cela parlait d’un retour des titans sur notre monde et d’un artefact majeur dont les pouvoirs seraient immenses bien qu’inconnus.

Sans pourtant nous concerter, nous avions tous entre aperçus une solution, une relique au pouvoir si grand qu’elle pourrait renverser le mal qui nous ronge. Mais à l’euphorie naissante vint l’angoisse, notre âme résonnait à la nouvelle.

Le pouvoir ... Inconnu mais assez puissant que pour mettre en péril l’équilibre de ce monde. Un pouvoir ... Mon ...


Après quelques paroles échangées, en évitant encore une fois les événements de Gangrebois, nous étions d’accord que pour assister l’ordre dans leur quête. Après tout il doit exister un lien avec notre précédente enquête et ce qui menace le monde menace également la vie et la paix qui nous sont chers.

Peu de temps après une lettre arriva jusqu’à notre caravane, celle-ci, aboutissement des missives que nous échangions amicalement avec l’ordre nous invitait à nous rencontrer à la demeure de leur prophète, Elkatnep, au Berceau de l’Hiver. Satisfait, nous éprouvâmes une certaine joie, tachetée malgré tout du doute qui nous habitait. Encore une fois personne n’en dit rien mais probablement tout le monde le pensait. Le futur était incertain...

Mais quoi qu’il en soit, il était temps d’écrire une nouvelle page sur les Derniers Gardiens. L'avenir nous apartient.

(hrp : jolie récit, j'aurais pas fais mieux, je fais une petite mise à jour du BG de Grim et le met en ligne bientôt. As tu mis ces merveilleux récits en ligne chez l'ordre ?)

D'abord je tiens a te remercier Glagla! C'est superbe ce que tu viens de faire pour notre guilde!
Sinon le récit.. un soupçon de Seigneur des Anneaux, un suspense a la Stephen King.. POuhaa.. même le Tauren guerrier un peu rustre que je suis reste en admiration devant une pareil oeuvre! Et alors chapeau car franchement c'est sensationnel..
Vivement notre fusion pour fêter cela dignemment avec nos amis de l'Ordre!

Encore bravo !!